Minimalistes, carbone, maximalistes… notre Kiné décrypte les tendances running
La kinésithérapie est souvent perçue comme une discipline d'accompagnement des blessures. Mais au-delà du soin, elle joue aussi un rôle clé dans la prévention et l’optimisation de la performance des coureurs.
Erwann Le Corre, kiné du sport et préparateur physique, nous partage son expérience et ses conseils pour une pratique durable et sans galère.
Chaussures de running : innovation ou effet de mode ?
Dans l’univers de la course à pied, les tendances en matière de chaussures évoluent constamment. Entre les modèles minimalistes qui prônent un retour à la foulée naturelle, les maximalistes qui amortissent chaque impact et les plaques carbone censées révolutionner la performance, difficile de s’y retrouver.
👉 Pour faire le tri entre ce qui fonctionne réellement et ce qui relève du marketing, nous avons demandé son avis à Erwann, kinésithérapeute du sport.
Minimalisme : retour aux origines ou fausse bonne idée ?
Le mouvement minimaliste a pris son essor avec la publication du livre Born to Run, qui vantait les bienfaits de la course pieds nus et des chaussures ultra-légères.
L’idée derrière cette approche : retrouver une foulée plus naturelle, avec une attaque médio-pied, et ainsi réduire les blessures.
Crédit : La clinique du coureur
Mais est-ce vraiment efficace ?
« Le problème, c’est le temps de transition. De nombreux patients sont venus consulter car le changement a été trop rapide entre la chaussure qu’ils avaient en pratique et un passage au minimalisme. Les structures articulaires, musculaires et tendineuses ne tolèrent pas les modifications trop brutales. Quelque soit l’objectif, la progressivité est de mise, tant à l’entraînement que lors d’un changement de chaussage. »
👉Autrement dit, les chaussures minimalistes ne conviennent pas à tout le monde. Elles peuvent être bénéfiques si on les adopte progressivement et si on a une bonne biomécanique. Mais vouloir courir en sandales du jour au lendemain, comme les Tarahumaras du livre Born to Run, est un pari risqué.
Les plaques carbone : révolution ou gadget ?
Depuis l’arrivée des chaussures à plaque carbone sur le marché, de nombreux records sont tombés. Ces modèles, plus rigides et dotés d’une mousse ultra-réactive, sont censés améliorer l’économie de course et réduire la fatigue musculaire.
Crédit : Site internet de Nike
Mais faut-il pour autant s’y mettre sans réfléchir ?
« ll est difficile de tirer des conclusions définitives sur les plaques carbones tant la recherche scientifique est difficile à mener à grande échelle. ». Un sentiment s’est tout de même dégagé avec les JO de Paris 2024 avec une impression d’augmentation du nombre de blessures au tendon d’Achille pour de nombreux athlètes de haut niveau.
Une étude menée par Wouter Hoogkamer en 2021 a montré sur le modèle étudié une perte de mobilité de la cheville ainsi qu’un risque de diminution de la charge sur le mollet et le tendon d’Achille pouvant entraîner des blessures de sous-utilisation. Attention donc à la dépendance à ces chaussures. « Les blessures sont multifactorielles, bien sûr, mais la modification du chaussage joue un rôle majeur, comme cela a pu être montré dans les sports collectifs comme le football et le rugby (chaussures, type de crampons, terrain...). »
Certains coureurs constatent des douleurs au mollet ou au tendon d’Achille après leur première utilisation. De plus, ces chaussures sont conçues pour la compétition et ne conviennent pas à toutes les sorties. « Elles peuvent être un atout pour les coureurs confirmés sur des séances spécifiques et les compétitions, mais elles ne doivent pas être utilisées tout le temps ».
En clair, les chaussures à plaque carbone sont performantes, mais elles ne sont pas miraculeuses. Pour en tirer parti, il faut les intégrer intelligemment dans son entraînement.
Maximalistes : un confort qui a un prix ?
À l’opposé du minimalisme, certaines marques ont développé des chaussures avec un amorti XXL. Popularisées par des modèles comme ceux de Hoka, ces chaussures dites « maximalistes » promettent un confort accru et une réduction des chocs.
Crédit : Podologie Vence
« Il faut faire attention aux effets de mode. Une semelle très épaisse peut réduire la perception du sol et impacter le contrôle moteur. Mais ça peut aussi apporter un confort appréciable pour certaines pratiques. »
Les maximalistes peuvent être une bonne option pour les longues distances ou les coureurs ayant des antécédents de blessures. Mais elles ne sont pas une solution miracle contre les blessures, comme certains le pensent.
Alors, quelle chaussure choisir ?
Finalement, aucune chaussure n’est parfaite. Le choix dépend de plusieurs critères :
✅ Votre type de foulée et vos antécédents de blessures : si vous avez des faiblesses aux mollets, le minimalisme n’est peut-être pas idéal. Si vous avez des douleurs aux genoux, un amorti plus important peut vous soulager.
✅ Votre expérience : les coureurs confirmés peuvent tirer parti des plaques carbone, alors que les débutants doivent d’abord travailler leur foulée et leur renforcement musculaire.
✅ Votre objectif : une paire carbone pour la compétition, une paire amortie pour les sorties longues, une paire plus neutre pour l’entraînement quotidien… Le mieux est souvent d’alterner.
« Il faut toujours penser aux variabilités individuelles. Un coureur qui a des antécédents musculaires au mollet ne va pas réagir pareil à une chaussure minimaliste qu’un autre. Il faut faire des choix adaptés à soi. Ne surtout pas hésiter à se rapprocher d’un professionnel de santé compétent, dans l’analyse de la course et le chaussage pour un bilan permettant de pouvoir faire un choix éclairé.»
Moralité :
Ne tombez pas dans les effets de mode. Testez, écoutez votre corps et adaptez votre équipement à vos besoins. Après tout, c’est bien vous qui courez, pas vos chaussures !
Qu’en pensez-vous ? Minimalistes, carbone ou maximalistes : quel est votre choix et pourquoi ? 💬💡
C’est officiel : Zara Athleticz débarque sur le marché des chaussures de running à plaque carbone. Oui, Zara. La marque espagnole, symbole de la fast fashion, a décidé de jouer dans la cour des Alphafly et autres Rocket X2. Une décision qui pose une vraie question : le running, n’est-il pas en train d’arriver à la fin d’un cycle voir une forme de saturation ?