Tout savoir sur la fréquence cardiaque du coureur

L’entraînement dit au cardio a ses adeptes. Mais s’entraîner à la fréquence cardiaque a-t-il un sens ? Que représente-t-elle ? Comment s’entraîner sur cette base ? Vous allez tout savoir sur la fréquence cardiaque du coureur.

Qu'est-ce que la fréquence cardiaque du coureur?

La fréquence cardiaque comme bien des domaines en ce qui concerne l’entraînement suscite les passions et semble générer des partisans et des opposants. Mais avant de revenir sur cet aspect, et au final de savoir si c’est une donnée réellement pertinente voire indispensable pour mener à bien ses séances, intéressons-nous tout d’abord à l’organe à l’origine de tout cela : le cœur. Fréquence cardiaque renvoie à fréquence du cœur, mais de quoi parle-t-on concrètement?

Lorsqu’on parle de fréquence cardiaque on fait référence aux battements du cœur. Le cœur est un muscle puissant. Petite particularité: c’est le seul muscle non fixé à un os dans notre corps. Il se détend et se contracte, et c’est cette fameuse phase de contraction qui détermine la fréquence cardiaque définie en battement par minutes. Lors de la phase de relâchement, la partie droite du cœur se remplit de sang riche en oxygène notamment, c’est la phase connue sous le nom de diastole. Au moment de la contraction, aussi connue sous le nom de systole, ce sang est expulsé dans l’ensemble de l’organisme. Le rythme cardiaque renvoie donc directement au nombre de systoles par minute. Pour schématiser cela vous indique le nombre de fois où du sang va être envoyé vers les muscles afin de les régénérer en oxygène.

On comprend bien que plus notre rythme cardiaque va s’élever, plus notre cœur va envoyer du sang et de l’oxygène à nos muscles. 

Fréquence cardiaque et entrainement du coureur

Le principe de base pourrait nous laisser penser qu’un rythme cardiaque élevé nous permet de répondre aux besoins de l’organisme. Mais ça, c’est la théorie. Déjà, la fréquence cardiaque n’est pas illimitée. Tout comme il y a une borne inférieure, il y a une borne supérieure, les deux étant individuelles. Ensuite, l'autre limite est la capacité d’éjection systolique. En d’autres termes la quantité de sang envoyée dans l’organisme à chaque battement. Au repos, en moyenne, ce volume est de 100mL, sachant qu’il varie de 70mL au repos jusqu’à 150mL chez un sportif/une sportive entraînée en plein effort. La fréquence cardiaque moyenne au repos étant de 70, chaque minute notre cœur envoie 4 900mL, 4,9 L, dans l’organisme. Prenons un athlète entraîné, ce volume peut monter à 27 000mL, soit 27L par minute sur un effort submaximal à 180 pulsations minute.

L’entraînement, parmi tous ses effets bénéfiques et les adaptations qu’il entraîne dans l’organisme, va permettre d’augmenter le volume d’éjection systolique. Concrètement le cœur va se renforcer de façon à pouvoir « grossir » dans un certain sens et pouvoir emmagasiner un plus grand volume de sang. Il va aussi se renforcer, au sens premier du terme, car qui dit plus de sang a éjecter dit besoin de plus de force pour le faire. Donc lorsqu’on dit qu’on travaille cardio ce n’est pas qu’une image et on renforce concrètement le muscle cardiaque avec un entraînement adapté et ciblé. Après tout comme la fréquence cardiaque, la capacité de volume cardiaque n’est pas infinie. Viendra un moment où, malgré l’entraînement, aussi bien réalisé soit-il, votre cœur ne pourra pas accueillir plus de sang et il devra donc augmenter son rythme afin de répondre aux besoins de l’organisme. 

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Plus vous vous entraînez, plus votre cœur va être en capacité d’envoyer un volume plus important de sang dans le corps. Du coup pour un même besoin le cœur battera moins fort car il aura expulsé dans le corps la même quantité de sang. Cet effet de l’entraînement a paradoxalement pour effet d’interdire la pratique de la course, et notamment du travail fractionné, à certaines personnes qui ont déjà un rythme cardiaque très bas et qu’il ne s’agit pas de faire descendre plus. Ainsi, passé un certain seuil, il existe un risque que le cœur ne redémarre pas. 

Cette pathologie cardiaque connue sous le nom de bradycardie. Pour la population moyenne, la limite est fixée à 50 battements par minute. Or dans le monde des sports d’endurance, de nombreux athlètes et pas forcément professionnel ce n’est pas rare. La limite pour les sportifs est communément fixé à 30. Et là vraiment il y a un réel risque à descendre en dessous. Un champion d’exception des années 90, le célèbre cycliste espagnol Miguel Indurain, souffrait de bradychardie et avait une fréquence cardiaque de repos de 28 pulsations minute. Après Indurain avait tout un staff médical autour de lui pour veiller à sa santé, il n’est donc pas conseillé de pratiquer un sport d’endurance sans surveillance professionnelle lorsqu’on atteint de tel niveau.

L’idéal : avoir une fréquence cardiaque de repos basse et une fréquence cardiaque maximale la plus élevée possible? 

Nous serions tentés de te dire « aucun des deux isolément » ou plutôt « les deux mon capitaine ». En effet, par exemple, une fréquence cardiaque de repos à 40 avec un max à 120 ou inversement un max à 200 mais une fréquence de repos de 90 n’aura pas une grande utilité. L’idéal est de combiner une fréquence cardiaque de repos basse à une fréquence cardiaque maximale haute de façon à avoir un spectre d’évolution, une zone de travail la plus grande possible. C’est ce qu’on appelle la fréquence cardiaque de réserve, la différence entre FC max et FC de repos.

La fréquence de réserve ou la méthode de Karvonen

Dans un entraînement au cardio, les allures sont définies en pourcentage de la fréquence cardiaque maximale. Ainsi l’endurance serait l’allure où notre Fréquence cardiaque se situerait entre 60 et 75% de la FCM, la résistance douce entre 75 et 85% de cette même FCM, la résistance dure de 85 à 95% de FCM et la puissance de 95 à 100%. Nous utilisons là les 5 zones définies par Karvonen qui n’ont plus forcément cours. On ne parle effectivement plus de résistance douce, aujourd’hui on dirait seuil ou tempo. Idem la résistance dure s’apparente au travail de VS10 ou de VMA. Et donc le fameux Karvonen raisonne en fréquence cardiaque de réserve. Ces différentes zones de travail sont calculées, non plus en fonction de la FCM, mais de la fréquence de réserve. L’endurance se situe alors entre 60 et 70% de cette fréquence de réserve, la résistance douce de 70 à 80%, la résistance dure 80 à 90% et la puissance de 90 à 100%. Cette approche m’apparaît plus pertinente du fait qu’elle prend en compte votre capacité cardiaque globale et non uniquement maximale.

Comment procéder pour déterminer la fréquence cardiaque de repos et la fréquence cardiaque max ?

Pour la FC max, il existe la formule 220-l’âge, mais cela n’est qu’une moyenne et n’est pas toujours vérifiable. Le moyen le plus efficace pour déterminer sa FC max est d’effectuer un test d’effort en laboratoire qui vous amènera logiquement à ce max. Un test d’effort de terrain vous donnera aussi une appréciation fiable de cette donnée. Pour la fréquence cardiaque de repos, c’est presque plus délicat. Logiquement il faut la prendre au réveil, avant de se lever et avoir eu un réveil doux, sans sonnerie stressante ou autre. Ces deux éléments: se redresser et être réveillé de manière brusque, impactent votre fréquence cardiaque. L’avantage c’est qu’avec les nouvelles montres, vous pouvez enregistrer vos données de sommeil et donc obtenir votre fréquence cardiaque la plus basse au cours de votre nuit. Mais il vous faudra dormir avec la ceinture, ce qui n’est pas forcément le plus agréable.

Prise de fréquence cardiaque au poignet ou à la ceinture ?

Le capteur poignet est un capteur optique. Votre montre envoie un signal lumineux qui va pénétrer les couches superficielles de la peau, se réfléchir et revenir à la montre. Les variations de pression dues au flux sanguin modifient cette lumière. En analysant les petites variations de lumière, votre montre va déduire votre fréquence cardiaque. On a déjà là le premier écueil car on est sur une déduction, une mesure indirecte. De plus la réflexion du signal peut être impacté par la couleur de votre peau et ses variations (par exemple lorsqu’elle rougit au froid ou à la chaleur, voire les peaux bronzés). La ceinture HRW procède elle à une mesure directe de l’impulsion électrique à l’origine de la contraction cardiaque. Elle est donc fiable même si elle peut être impactée par un environnement particulier (par exemple lorsque vous passez sur un pont au-dessus de voies de chemin de fer avec des lignes à haute tension).

La dérive cardiaque: nouvelle donnée de plus en plus utilisée

L’utilisation de la dérive cardiaque a pour but de surveiller la charge d’entraînement et de prévenir la fatigue. Ce procédé est à réserver à des athlètes confirmés et qui ont l’encadrement nécessaire. Il faut en effet mesurer chaque jour de manière fiable les différentes données liées à votre activité cardiaque (au repos et à l’effort) pour ensuite interpréter les variations qui apparaissent. Les mesures s’effectuent généralement sur un système glissant de 10 jours. Si l’outil semble intéressant il est encore très peu utilisé même au plus haut niveau. Il a ses partisans et ses opposants. Des travaux complémentaires doivent encore être menés en la matière, certains spécialistes de la préparation physique estimant même que la dérive cardiaque n’est pas un bon indicateur de charge de travail interne.

Notons qu’en cas de surcharge d’entraînement voire de surentraînement on constate une augmentation de la fréquence cardiaque de repos. Comme toute mesure, pour en tirer des enseignements, il faut qu’elle soit correctement effectuée et suivie. En effet, avoir sur 1 jour une augmentation de la fréquence cardiaque de repos ne dira pas que vous êtes en surcharge d’entraînement. Par contre, si vous mesurez correctement, c’est-à-dire au même moment dans les mêmes conditions, et que pendant 5 jours de suite, la fréquence cardiaque de repos est supérieure de 10 bpm à ce qu’elle est habituellement, il y a un souci. C’est un bon outil de suivi mais pas le seul. Il doit être corréler à d’autres éléments. En effet la fréquence cardiaque est impactée par le niveau de stress. Vous pouvez donc être dans une situation de charge d’entraînement normale mais dans une période professionnellement ou personnellement stressante et du coup, voir votre fréquence de repos augmenter.

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L’entraînement au cardio est-il intéressant voire même pertinent? 

Quand on prépare une compétition, l’objectif est en temps, pas en maintien de pourcentage de fréquence cardiaque. Il est donc délicat de baser ses allures uniquement sur la fréquence cardiaque. Mais tout n’est évidemment pas à rejeter car le suivi de fréquence cardiaque peut donner des informations sur la manière de réagir du coureur aux différentes stimulations, intensités de l’entraînement. Mais encore faut-il bien prendre les mesures et réellement savoir les analyser.

Pour toutes celles et tous ceux qui sont en phase de reprise ou qui pratiquent la course dans une optique de santé bien être, l’entraînement à la fréquence cardiaque semble par contre totalement indiqué car il permet notamment d’éviter un écueil récurrent de tous les coureurs/coureuses: aller à une allure trop rapide. En dehors de ces deux situations spécifiques, la fréquence cardiaque comme unique outil de fixation des allures ne semble pas à privilégier. 

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